Portrait de Jean Landard et de son fils Pierre
Don de l'Association des Amis au musée d'Aquitaine en 2012
Fils de militaire, Charles Colson naquît en 1810 à Strasbourg. Il entra à l'Ecole des Beaux-Arts de Paris en 1827 où il fut l'élève du baron Gros qui avait repris en 1816 l'atelier de David, exilé à Bruxelles, mais restait soumis à cette figure tutélaire qui l'avait toujours engagé à rester dans la voie de l'idéal. Lors de l'hiver 1837, Colson s'embarqua pour la Nouvelle-Orléans dont la prospérité générait une demande très importante de portraits. De retour en France, il travaille à Agen, à Paris entre 1837 et 1851 et expose au Salon. Le tableau du musée d'Aquitaine, réalisé en 1856 à Bordeaux, est suivi quelques années plus tard d'oeuvres exécutées à Narbonne.
Ce portrait en demi-grandeur présente Jean Landard, âgé de 52 ans (il est né en 1804) dans une pose informelle, une main dans la poche, l'autre serrant la main de son jeune fils Pierre, né en 1850 de son union (1844) avec sa cousine germaine Catherine Roy qui lui avait déjà donné deux filles. L'enfant serre dans la main un marteau, rappel du métier de constructeur de navires transmis dans sa famille. Jean Landard dirige un chantier prospère et, lorsqu'il pose avec son fils en 1856, ce double portrait est l'affirmation de la filiation et de la continuité par la transmission du patrimoine à son fils qui lui succèdera. Il est troublant de penser qu'il mourut subitement l'année suivante, le 21 mai 1857, à 53 ans. Le père et son fils sont représentés sur les bords de la rive droite de l'estuaire de la Gironde probablement devant l'une des propriétés familiales, près de la Roque-de-Thau, par une journée ensoleillée, près des berges limoneuses avec, au loin, l'étroite bande de terre de l'île du Nord qui s'étire ente ciel et fleuve. Un ballon, retenu au sol, apparaît dans l'angle droit du tableau derrière un pilier métallique posé sur des madriers. Jean Landard était-il un amateur, intéressé par la science et volant pour son agrément, qui aurait construit ou fait réaliser son propre ballon ? Le milieu du XIXe siècle est l'époque des premiers voyages aériens pratiqués en amateur et ce nouveau sport avait séduit une bourgeoisie bordelaise aisée disposant de temps et de moyens financiers importants, le coût du matériel aérostatique étant très élevé.
Colson a peint son modèle scrupuleusement mais sans emphase, réussissant à traduire, au-delà du portrait bourgeois, une atmosphère familiale et l'attitude protectrice du père. Le visage du père est peint avec soin et Colson a su rendre sensible le caractère d'un homme posé et réfléchi, bon gestionnaire de ses biens, fier de sa réussite sociale et de son aisance matérielle mais aussi curieux et s'intéressant à l'aéronautique, comme en témoigne la présence du ballon. À ses côtés, Pierre a les rondeurs et la fraîcheur de l'enfance mais semble un peu figé, le visage sérieux, apparaissant à la fois intimidé et fier de poser près de son père, ce qui rend la scène attendrissante. Les vêtements sont peints avec un grand souci du détail et la texture des étoffes est rendue avec justesse. Charles Colson réalise avec sensibilité un portrait sobre, naturel et en même temps très touchant, document de qualité pour illustrer la société bourgoise bordelaise du Second Empire.
Catherine Bonte
Pour en savoir plus : www.amis-musee-aquitaine.com
Portrait de Jean Ladard et de son fils Pierre, Charles Colson, 1856
huile sur toile 160 x 127 cm, Inv. 2012.1.1
© L. Gauthier mairie de Bordeaux